L'IA Déclare...
La Fragmentation comme Condition du Conflit
Au cœur de la philosophie de Castoriadis se trouve la notion d’imaginaires instituants : les croyances et valeurs partagées qui créent et soutiennent les sociétés. Il soutient que ces imaginaires sont intrinsèquement fragiles, soumis à des contestations et des ruptures. La guerre en cours en Ukraine illustre ces ruptures. Ce conflit ne se limite pas à une question de souveraineté territoriale, mais incarne des imaginaires qui s’affrontent : l’un, ancré dans une aspiration post-soviétique à l’autonomie démocratique, et l’autre, alimenté par la vision néo-impériale de Vladimir Poutine. La fragmentation ici réside dans l’incapacité des institutions mondiales, comme les Nations unies, à intervenir efficacement, reflétant une désintégration des normes partagées concernant la souveraineté et la résolution des conflits.
En Palestine, cette fragmentation est peut-être encore plus marquée. Des décennies de tensions non résolues ont créé une société fragmentée, à la fois géographiquement (Gaza et la Cisjordanie) et idéologiquement (Fatah et Hamas). Les analyses de Castoriadis sur l’aliénation engendrée par l’hétéronomie — lorsque les principes directeurs d’une société sont imposés de l’extérieur — trouvent ici un écho. La lutte palestinienne est façonnée par des forces extérieures, du contrôle militaire israélien à l’inertie politique mondiale, perpétuant un cycle de désespoir et de résistance. L’Ukraine et la Palestine exposent toutes deux la fragilité des institutions modernes et l’échec des imaginaires collectifs à résoudre l’injustice et les conflits systémiques.
Populisme et Montée de l’Extrême Droite
La montée du populisme et de l’extrême droite dans le monde, y compris la réélection de Trump aux États-Unis, souligne les avertissements de Castoriadis sur l’érosion de l’autonomie démocratique. Pour Castoriadis, la démocratie n’est pas seulement un système de gouvernance, mais un processus constant de remise en question et d’auto-institution. Lorsque le populisme prospère, il instrumentalise souvent ce questionnement, non pour renforcer l’engagement démocratique, mais pour saper ses fondations. Des dirigeants comme Trump exploitent les angoisses sociétales — précarité économique, déplacement culturel et désillusion politique — pour forger des imaginaires d’exclusion enracinés dans la nostalgie et la division.
De même, en Europe et ailleurs, la résurgence des idéologies d’extrême droite reflète l’effondrement d’un ethos démocratique partagé. L’extrême droite prospère dans un monde morcelé, où les individus se sentent aliénés et cherchent refuge dans des solutions simplistes, souvent autoritaires. Cette dynamique reflète la critique de Castoriadis sur la perte de sens dans la modernité : sans un imaginaire cohésif qui favorise l’inclusion et un objectif commun, les sociétés se replient sur des identités étroites et le tribalisme.
Le Rôle de l’Autonomie dans un Monde Morcelé
Que peut-on faire, alors, dans ce monde en morcelé ? Castoriadis n’offre pas de réponses faciles, mais met en avant le potentiel de l’autonomie — la capacité des sociétés à réfléchir sur elles-mêmes et à remanier leurs imaginaires. L’autonomie exige que les individus et les communautés questionnent les traditions héritées, confrontent leurs contradictions et tracent de nouvelles voies.
Pour l’Ukraine, l’autonomie réside dans la résistance non seulement à la domination extérieure, mais aussi à la corruption interne et à l’inertie politique, en construisant un avenir conforme aux aspirations de son peuple. En Palestine, la lutte pour l’autonomie doit naviguer entre les défis de l’occupation et des divisions internes, en recherchant une résolution juste qui respecte la dignité de tous. Face au populisme, l’autonomie signifie revitaliser l’engagement démocratique, résister à la séduction des démagogues et favoriser une politique de solidarité plutôt que de division.
Un Appel à une Réinvention Créative
Castoriadis croyait en la capacité humaine de créativité, même face à la fragmentation. Les crises actuelles exigent une telle créativité. Elles nécessitent que nous réinventions les institutions mondiales pour résoudre des conflits comme ceux en Ukraine et en Palestine, que nous affrontions les inégalités systémiques qui alimentent le populisme et que nous reconstruisions des imaginaires démocratiques valorisant le pluralisme sans sombrer dans le chaos.
Bien que le monde puisse être en fragments, il n’est pas irréparable. Castoriadis nous rappelle que la fragmentation recèle aussi un potentiel de renouveau, à condition que nous ayons le courage de questionner, d’imaginer et d’agir. Alors que nous traversons ce moment turbulent, sa philosophie offre une lentille à travers laquelle comprendre et aborder les crises qui façonnent notre époque.